Ils sont la gauche? Pitié, non.


Ils sont blogueurs et twittos influents avec leurs milliers de followers. Ils donnent les bons et les mauvais points au gouvernement. Ils nous disent ce qu’est la gauche (la vraie évidemment), ce que la gauche (la vraie toujours) doit penser, ceux qui sont les gentils mais surtout ceux qui sont les méchants. Par exemple pour eux: Manuel Valls, Caroline Fourest ou encore Stéphane Rozès sont au mieux des sociaux-traîtres au pire des agents racistes des néo-conservateurs américains. Nous pourrions nous en foutre, me direz-vous? Oui mais l’heure n’est plus à la rigolade, cela en est même inquiétant.  Au détour d’un petit lien, d’un petit retweet, ils ont trouvé un nouvel ennemi: celui qui pourra enfin faire le lien entre les méchants de gauche, les méchants du centre et les méchants de droite. Ce terrible secret à la base d’un complot (sûrement judéo-maçonnique) permettant l’assise de la domination de la race blanche anti-musulmane a enfin un nom: LA LAÏCITÉ. 

Avant de lire ce brûlot torchon d’un certain Dominique Ziegler – auteur metteur en scène suisse – (la laïcité française est donc son domaine d’excellence), nous aurions pu nous dire que l’auteur allait s’attaquer, à juste titre, à la vague ultra-laïciste de droite et d’extrême-droite (UMP, FN, Risposte Laïque…) à ceux qui avancent masqués contre l’islam, à ceux qui confondent l’espace public et l’espace civil.  Evidemment, non. L’auteur s’en prend à la gauche, la même que celle vomit les auteurs susnommés. Cette gauche pernicieuse qui serait le mal incarné. D’abord, il met en cause Jules Ferry le citant mal (erreur de date et propos non tenus, deux clics suffisent pourtant pour retrouver la bonne citation) tout en omettant le vrai théoricien de la laïcité, Ferdinand Buisson. Cela aurait sûrement demandé plus de temps, plus de recherches mais, par les écrits, auraient contredit son idéologie caricaturale. Puis, c’est le tour de Charlie Hebdo d’être conspué, qualifié de journal de néo-conservateurs (le professeur Choron doit se retourner dans sa tombe) pour ses caricatures islamophobes. Qu’aurait pensé l’auteur de ces dessins à leur époque? (ce n’est peut être pas drôle, c’est peut être vulgaire mais rien n’interdit à ces caricaturistes de le faire)

Et enfin, la charge se termine par Caroline Fourest et par un soutien à Tariq Ramadan membre tout comme lui de l’Association La Page Cornée. La boucle est bouclée. Et enfin, une conclusion des plus … je cherche encore le mot.

« Le double mouvement impulsé par Jules Ferry a débouché sur un des rares exemples de dialectique négative, permettant à tous les apôtres de la tolérance, de l’enseignant de gauche jusqu’au punk à chiens, des anciens soixante-huitards jusqu’aux réactionnaires lettrés, en passant par les centristes mollassons, de marcher main dans la main avec les extrémistes de droite les plus redoutables dans une belle unanimité anti-arabe. » 

Voilà où en est rendue une certaine gauche. Après nous avoir fait détester le mot nation, après nous avoir fait vomir le drapeau bleu-blanc-rouge, après nous avoir fait siffler la Marseillaise, ils tentent de nous faire rejeter un des plus beaux mots de la langue française: le mot laïcité. Ces mots récupérés à tort par la droite et l’extrême droite sont de gauche, celle des Lumières. Ne les laissons pas, une fois de plus, galvauder ce beau principe qu’est la laïcité: seul espoir du vivre ensemble. Ce mot, que les auto-proclamés de la vraie gauche, aiment à se rappeler quand ils tapent, à juste titre, sur les curetons et autres rabbins dans le débat actuel sur le mariage civil pour tous.

N’étant pas très doué, je laisse conclure Brice Couturier qui, le 02 novembre dernier, nous rappelait justement sur France Culture:

« Il me semble à moi que le combat d’aujourd’hui ne se déroule plus entre une gauche qui aurait le monopole des Lumières et une droite celui des Anti-Lumières, mais entre un « camp des Lumières » qui rassemble gauche et droite laïques, républicaines et universalistes, d’une part, et les camps des Anti-Lumières ; celui d’une droite crispée sur un communautarisme d’un autre âge – la terre et les morts – et une gauche prétendument nouvelle, qui fait le jeu des nouveaux communautarismes, ethnico-culturels, qui ne valent pas mieux. Car  les conflits sur lesquels ils pourraient déboucher un jour peuvent se révéler d’une horreur égale ou pire que vieilles guerres nationales de jadis ; la guerre civile  inter-communautaire du Liban l’a démontré amplement. Leur point commun : le culturalisme, la croyance en des sociétés organiques, closes et an-historiques, débouchant sur l’exigence de « droits particuliers ». 

Compléments:

A lire:

La laïcité face au communautarisme et à l’ultra-laïcisme par C. Kintzler.

Questions fréquentes sur la laïcité par C. Kintzler.

Comment la laïcité a été offerte en cadeau au Front national par C. Kintzler.

Histoire de la Calotte. 

Racisme légal de Dominique Ziegler

A regarder:

Laicité: Valeur Universelle Ou Spécificité ? par S. Tomeï

Samuel Tomeï – Laicité: valeur universelle ou… par richestmedia

7 réflexions sur “Ils sont la gauche? Pitié, non.

  1. bon billet, deux choses
    1 il y a des gens qui dans ces mouvances, certes en effet criticables comme tu le fais représentent du monde, organisent des choses, d’autres seulement eux-mêmes et se content du veilleitaire. Ne les mettons pas sur le même plan même si la question de fond est la même

    2 Le clivage gauche droite reste tout de même le clivage primordial

  2. LOL’D @ « la terre et les morts – communautarisme d’un autre âge ».

    Apprenez à écrire ne serait-ce que trois fois moins bien que Barrès, nous en reparlerons après.

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