Tour Triangle : ni pour, ni contre


Le débat sur la construction de la Tour Triangle porte de Versailles a été relancé récemment par la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui se dit déterminée à ce que le projet aboutisse. Soutenue par des architectes (Anne Demians, Francis Soler, Dominique Perrault, Edouard François, Eric Lapierre, Julien Rousseau, Jean Bocabeille) qui ont lancé une pétition pour la Tour Triangle, Anne Hidalgo est face à de nombreux opposants (l’opposition UMP, EELV, le PCF, collectif anti-tour, association de patrimoine…). Courageusement, j’ai décidé de prendre position : je ne suis ni pour ni contre.

Courageusement, car, en ne prenant position ni pour la construction de la Tour Triangle, ni contre, je ne satisfais ni la mairie de Paris, ni mes confrères architectes, tout en me mettant à dos ceux avec lesquels je partage certains combats (Poste du Louvre, piscine Molitor…). Mais voilà, le sujet est complexe et ni les partisans, ni les opposants n’ont réussi à me convaincre. A la fois, tous les arguments et aucun d’entre eux n’arrivent à me décider sur les bienfaits ou non d’une telle construction.

Pour 

La qualité indéniable du binôme suisse Herzog et de Meuron laisse à penser que la réalisation sera à la hauteur des attentes architecturales du projet.

Contrairement aux Serres d’Auteuil, à la Poste du Louvre, à la Samaritaine, à la piscine Molitor, ce projet ne concerne aucune destruction d’architecture patrimoniale.

Il faut arrêter de dire que cette tour sera construite dans Paris. Cette tour sera construite sur un No man’s land coincé entre le boulevard des maréchaux et le périphérique.

La construction d’un tel bâtiment pourra permettre de montrer aux yeux du monde que Paris est une ville qui bouge qui ne repose pas que sur son patrimoine et ses musées et qu’elle est prête à affronter le XXIème siècle.

Le travail des architectes permettra de re-qualifier les espaces publics inexistants aux abords du parc des expositions et c’est tant mieux.

Contre

La question est simple : a-t-on besoin de cette tour de bureaux à cet endroit, alors qu’il y a des milliers de m² de bureaux vides à Paris ?

Le projet de construction de cette tour résulte d’une logique libérale de politique de l’offre. L’argument principal étant la création d’emploi grâce à cette tour. Jamais un immeuble (hors construction) n’a créé de l’emploi.

L’appel à des promoteurs privés dans de telles opérations n’augure jamais rien de bon. Quand la maire de Paris explique que la Tour ne coûtera rien aux Parisiens, je me méfie. Un promoteur ne fait jamais rien gratuitement.

Ce qui n’est pas acceptable, c’est que la mairie de Paris puisse de façon dérogatoire et non concertée modifier le PLU pour faire passer un projet.

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Lors du prochain conseil de Paris, lundi 17 et mardi 18 novembre, les conseillers de Paris devront faire un choix, un choix historique. Personnellement, je ne sais toujours pas ce que je voterai partagé entre mon métier d’architecte qui me fait pencher du côté du POUR et mon engagement citoyen qui me fait pencher du côté du CONTRE. Dans tous les cas, Anne Hidalgo gagnerait à assumer totalement le projet sans essayer de nous vendre une crèche et des commerces pour mieux nous faire passer la pilule. Du courage, il en faut, mais jusqu’au bout.

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11 réflexions sur “Tour Triangle : ni pour, ni contre

  1. L’argument ‘contre’ n’est pas très convaincant. Certes il y a des milliers de m2 de bureaux vides mais ce sont à 90% des bâtiments de petite taille et/ou obscolescent. Les clients susceptibles de venir se loger dans cet édifice de plusieurs dizaines de milliers de m2 ne s’installeront jamais dans des immeubles de quelques centaines ou milliers de m2. Par ailleurs ça me semble extrement réducteur de lier ‘bureaux’ à ‘ultraliberal’. Il faut bien bosser dans des locaux!
    Enfin l’argument pour ne me SEM le pas très creusé. Personnellement je ne trouvepas le projet très elegant dans le paysage. Ça ressemble à un gabarit de PLU. Bof. Et beaucoup estiment qu’il est préférable de créer des tours par paquets plutôt qu’isolee. Je crois que c’est effectivement plus pertinent.

  2. « Personnellement, je ne sais toujours pas ce que je voterai partagé entre mon métier d’architecte qui me fait pencher du côté du POUR et mon engagement citoyen qui me fait pencher du côté du CONTRE » !!!
    Pour ne pas commenter ligne à ligne vos réflexions, arrêtons-nous à cette synthèse que vous faites.
    Comment vivez-vous cette totale schizophrénie qui vous fait travailler, en tant qu’architecte, contre les citoyens ? Comment supportez-vous cela? L’assumez-vous?
    Autrement dit, comment, quand la question est bien posée, ne pas trouver la réponse, qui devient évidente.
    Autant vous ajoutez à la liste des « architectes » que vous citez; ce sera plus clair. Les citoyens, parisiens ou autres, vous en seront reconnaissants.

  3. Il y avait bien des arguments contre (pas simplement la question du besoin) :
    – où vont loger ce qui y travailleront ? Loin ? Dans ce cas les transports sont-ils adaptés ?
    – une tour sera-t-elle jamais écologique ? Thierry Paquot et bien d’autres experts en bâtiment disent non. Par sa forme elle génère des dépenses incompressibles.
    – une tour crée-t-elle de la densité ? Encore non, sauf à adopter les prospects de Hong Kong. Et encore, quelle perte d’espace pour les gaines d’ascenseurs, d’escaliers, d’autant plus importante que la tour sera haute !
    Les arguments pour ?
    A-t-on seulement fait un audit de ce qui manque à ce quartier ? Si le projet avait constitué une réponse à un problème correctement posé, il y aurait eu des arguments pour.

  4. POUR:
    – les star’chitectes et ceux qui rêvent de le devenir ?
    – les politiciens qui rêvent d’un grand geste historique ?
    – les actionnaires du BTP et des banques ?
    CONTRE
    – tous les autres ?

  5. Je trouve que les arguments a faveur de cette construction sont plus forts que les arguments en contre. Seulement pour ce qui concerne a la création d’emploi, c’est vrai que un immeuble ne crée pas de l’emploi sauf que pendant sa construction, mais ça c’est déjà pas mal. Je pense que il est déjà temps de construire quelque chose de monumental dans la ville de Paris.

  6. C’est vrai que Paris manque de monuments !!!
    On pourrait faire le musée de la connerie, rien que pour créer des emplois, y compris des emplois d’architectes-esclaves. Et je ne dis pas en forme de quoi il devrait être !

  7. Herzog et De Meuron m’ont habitué à de biens meilleurs projets. On sent sur ces échelles et, avec l’échelle de la tour en général, des erreurs plutôt asiatique et moyen-orientesque. (on peut faire du néologisme encore!). Je m’explique pour les adorateurs de tours: qu’ils aillent en Seine-saint denis faire un tour pour voir ce qui s’y passe. Non pas pour une certaine forme de mixité entre couleurs de peaux (ce qui peu être intéressant voir riche ou nécessaire aujourd’hui) mais plutôt pour ce que j’appellerai une certaine forme de ségrégation spatiale. Et oui, arrêtons l’hypocrisie, les riches feront toujours tout pour éviter d’habiter dans des gros collectifs même si ont mettait du marbre sur les façades. Pour des programmes peu ou pas mixte du tout comme celui-ci (bureaux, salle de réunion, commerces, restaurant panoramique) on peu imaginer des plots ou groupement, nettement moins imposant en terme de gabarit et tout aussi dense, en rapport réel avec les entourages. Paris reste la ville la plus dense au monde! Incroyable et sans tour ou presque.(250 000-> c’est le nombre de personnes qui viennent travailler tous les jours à la Défense et qui repartent le soir) Pour ceux qui parlent de milliers de m² inoccupés (bureaux+ logement) il faudra bien faire quelque chose un jour. (même si ceux ci ne sont pas en RT2012). Vous l’aurez deviné je suis plutôt contre ET en tant qu’architecte! Si si mais c’est parce que je ne suis pas un Star-CHIE-tecte mais un simple citoyen qui souhaite faire avancer la Cité en espérant ne pas être réactionnaire. Je pense ne pas devoir avoir honte de ne pas être fan de tours.

  8. Mais l’abeille, on aimerait un avis de l’architecte sur l’architecture. Or vous n’en dites rien. Pas bien çà. Moi, je vais vous dire, un machin plat et fade qui fait 160 m à la base sur 180 m de haut, c’est une énormité, une incongruité. Allez sur place. Mettez-vous en position et imaginer. J’en ai vu des tours en une vie de voyage. Mais une incongruité pareille, jamais. Et ne parlons pas des arguments indigents sur le lien avec la banlieue et autres inepties. Et puis attendons un peu la tour des mêmes architectes pour la laboratoire Roche à Bâle? C’est du kif !

  9. La Tour Triangle en proie au manichéisme?

    Nul ne saurait combattre l’audace du futur sans s’exposer au risque d’être perçu comme ennemi de son temps. Il appartient cependant à la société toute entière d’envisager cet horizon culturel et non aux seuls architectes. En polarisant le débat sur l‘objet architectural, ne fait-on pas le lit du rejet des tours à Paris?

    Elever le débat sur les tours à Paris serait une mesure d’utilité publique salutaire. C’est ce dont pourraient convenir la majorité des (grands) parisiens, si les sondages réalisés ne consistaient pas uniquement à leur demander de se ranger dans le camps des partisans ou des détracteurs. Assénés depuis une dizaine d’années, les arguments opposés par les uns et les autres finissent par ne plus porter, voire même par s’annihiler. Le principal revers dans l’affaire de la tour Triangle, conçu par les architectes Herzog & De Meuron, est d’ordre culturel. Rivé sur la question de l’objet architectural, le débat sur les tours à Paris souffre de l’absence de promotion d’une vision de la ville et de pédagogie appropriée à cet objectif. Vantées au Pavillon de l’Arsenal, notamment par Jacques Herzog lors d’une leçon d’architecture magistrale, les qualités du projet architectural de la tour Triangle l’auront sans doute été en vain, tant elles paraissent loin d’être en cause.

    Le projet a partie liée avec l’impérieuse nécessité d’une modernisation du parc des expositions de la Porte de Versailles au contrat de concession renouvelé. Pauvres, les discours politiques se bornent à illustrer cette ambition à travers l’érection in situ de la huitième merveille du monde. Tous ceux qui se bousculent par centaines de milliers dans les salons annuels les plus populaires, tels ceux de l’agriculture et de l’automobile, ont eu à subir l’inhospitalité et la piètre qualité du site, en essuyant le mépris qui les sous-tend. L’obsolescence des pavillons, vulgaires boîtes à chaussures alignées, contraste avec le succès de fréquentation européen du parc des expositions, qui, comme la tour Eiffel, accueille chaque année sept millions de visiteurs.

    Dans la course à l’attractivité des métropoles, l’image de marque du parc des expositions de la porte de Versailles ne paraît pas un facteur mineur. Réduire cette image à la présence d’une tour de bureau, « convertible en tour de logement » si la conjoncture l’exige, relève d’un culte, voire d’un fétichisme de l’objet, qu’exacerbe apparemment le prestige international de sa signature architecturale. Si Paris ne peut renoncer à un investissement privé de cette ampleur, la question du tribut apporté au « bien commun territorial » ne semble pas non plus devoir être tenue pour subsidiaire. La noblesse de mission du politique obligerait celui-ci à en faire la démonstration à la faveur de l’élargissement du débat à l’avenir du parc des expositions. Etant donné l’état dépressif du marché immobilier des tours de bureau, notamment à La Défense, l’argument des cinq mille emplois, transférés plutôt que créés, paraît, quant à lui, fragile.

    L’autre faille majeure dans la communication du projet de la tour Triangle, prolongeant le débat sur les tours à Paris engagé sous la première mandature de Bertrand Delanoé, réside dans la caution apportée à la stigmatisation du legs moderniste. Ainsi, a-t-on promis aux parisiens, que les nouvelles tours érigées ne ressembleraient en rien à celles des années 1960-70. Quarante ans après l’interdiction des tours à Paris, promulguée par Valéry Giscard d’Estaing, le procès de cette architecture maudite tient toujours lieu d’arme dissuasive. Pour ne pas sombrer dans l’anachronisme, mieux vaudrait pourtant éviter de s’avancer sur le terrain miné des jugements de valeur et assumer enfin cet héritage sociétal. Ayant mesuré les effets contre-productifs de la diabolisation du legs moderniste, l’architecte Jean Nouvel n’omet pas de plaider aussi en faveur de la requalification des quartiers de tours des années 1960-70, lorsqu’il se fait l’avocat de la tour Triangle.

    Indépendamment du fait que les tours des années 1960-70 sont loin d’être toutes sans qualité et de l’exercice légitime d’un droit d’inventaire, l’exemplaire réhabilitation de la tour Bois-le-Prêtre témoigne du sort enviable susceptible d’être réservé même à celles sans qualité. Ancrer les tours dans l’histoire urbaine de Paris et faire preuve d’audace quant à leur futur servirait l’ambition politique de ceux, qui ne veulent pas renoncer pas à la grande hauteur à Paris. Comme il en va du paysage et de l’attractivité de la métropole, élargir le débat au Grand Paris serait opportun. Les 65 pays représentés à la XIVème biennale d’architecture de Venise, dont les portes viennent de se refermer, étaient invités par Rem Koolhaas à se pencher sur la question de « l’absorption de la modernité ». Il semble, que dans la capitale nous n’y soyons pas encore disposés. Pour sortir de l’impasse manichéenne du débat sur les tours à Paris, ne faudrait-il pas ouvrir de nouveaux horizons de pensée?

    Françoise Moiroux

    • Mais Madame, heureusement qu’il existe des ennemis de « leur temps », quand c’est le temps du cynisme et de la corruption, quand les architectes baissent leurs culottes pour quémander quelques projets, les plus gros possibles… pour de gros honoraires !
      Avez-vous écouté « la société toute entière », plutôt que les architectes ou les politiques? 80% des parisiens souhaitent vivre dans des maisons… pour être libres, ne pas être assujettis à des promesses politiques (logements sociaux), à des charges de copropriétés (syndics et autres), à des constructions mal faites… Que pensez-vous de cela? Que les français ont tous tord? Qu’ils ont perdu la raison?
      Ils attendent donc vos discours éclairés.
      Or, que dites-vous?
      Je n’ai rien compris à votre discours: « l’absorption de la modernité » ???
      Koolhaas, Nouvel, etc.
      Je réponds; Adidas, Nike, etc.
      Respectez-vous le Pritzker Price? savez-vous qui décide de ce prix? Comment s’est créée la richesse de cette famille? Pourquoi quelques uns acceptent ce prix…
      La conscience « politique » a complètement disparu à notre époque! La conscience tout court.
      Sans doute est-ce cela que vous voulez nous démontrer.

  10. Pas mal votre papier. Mais quand même une critique. Je ne vois pas comment redonner une qualité quelconque aux multiples tours construites dans Paris au cours des années 1970. Le pavillon de l’Arsenal s’est essayé à cette opération de promotion, histoire d’aider à la relance des tours à Paris. Sans succès apparemment. Bois le Prêtre était un bel exercice,mais exceptionnel, d’une difficulté extrême et d’un coût que je pense élevé. Croyez-vous réellement que maintenant quelqu’un va se coltiner avec les tours de Beaugrenelle, les tours Italie, les tours de la cité Michelet et celles des orgues de Flandres, de Belleville ou de la place de fêtes. Et puis, à supposer qu’on y arrive dans 50 ans, la question des tours sera évacuées de Paris depuis longtemps.

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