Le 17 février dernier, dans la citation du dimanche 16, je vous invitais à re-découvrir un extrait du court essai La diversité contre l’égalité de Walter Benn Michaels auteur et professeur de littérature à l’université de l’Illinois à Chicago.
Sorti en 2009 en français dans la collection bourdieusienne Raison d’agir La diversité contre l’égalité de Walter Benn Michaels est un petit essai de 150 pages qui aurait du être entre toutes les mains de nos politiques, de droite comme de gauche mais surtout de gauche tant la justesse de son propos n’est plus à démontrer et ce, encore trois ans après. Avant toute chose: une précision importante : jamais l’auteur ne remet pas en cause la nécessité de lutter contre le racisme ou le sexisme et toutes formes de discriminations.
Walter Benn Michaels avance une thèse simple (qu’il martèle tout le long du livre) : le combat pour la diversité n’est qu’un leurre qui crée l’illusion de l’égalité : pendant que l’on se préoccupe de problèmes de diversité, de discrimination positive, on oublie l’essentiel: les classes sociales et leurs différences. En ralliant le concept de diversité, la gauche n’a fait que servir l’idéologie néo-libérale. Ainsi, sa thèse pourrait se résumer en une phrase du livre : « La diversité n’est pas un moyen d’instaurer l’égalité ; c’est une méthode de gestion de l’inégalité» .
Parlant de la France qu’il connait bien, l’auteur nous explique que depuis 1983, date du tournant libéral et de la naissance, un an plus tard, de SOS-Racisme « la lutte contre les discriminations a remplacé la rupture avec le capitalisme en tête de l’agenda politique». A travers ce livre, on peut lire que la France s’est engagée dans le même chemin que les Etats-Unis, qu’elle est devenue un pays où la différence entre droite et gauche est devenue difficilement perceptible. Thèse que l’on peut retrouver, sous d’autres aspects, chez Jean-Claude Michéa (ici).
Pour Walter Benn Michaels, la seule solution (déjà évoquée sur ce blog) : que la gauche soit combative envers le social (et non pas que sociétal) et qu’elle fasse de la revendication à l’égalité son principal combat. Bobby Seale, cofondateur du Black Panther Party (cité par WBM) disait déjà à la fin des années 1960 : « Ceux qui espèrent obscurcir notre combat en insistant sur les différences ethniques aident au maintien de l’exploitation des masses, c’est à dire des Blancs pauvres, des Noirs pauvres, des bruns [Hispaniques], Indiens, Chinois et Japonais pauvres, bref de l’ensemble des travailleurs. (…) Nous ne combattrons pas l’exploitation capitaliste par un capitalisme noir. Nous combattrons le capitalisme par le socialisme. »
Le livre est parfois redondant, parfois caricatural et a un style très américain (pop culture inside) mais Walter Benn Michaels nous rappelle à raison que derrière l’apparence du consensus de la diversité se cache surtout la volonté de ne rien changer du néo-libéralisme et des inégalités sociales qu’ils engendrent. Même Caroline de Haas a aimé le livre (là).
D’accord, pas d’accord avec la thèse: vous souhaitez en débattre, cliquez sur l’image ci-dessous et inscrivez-vous à la conférence-débat du 27 mars prochain ou ici.
A lire aussi:
La diversité est au service du néolibéralisme ! chez Marianne
Critique Igor Martinache chez Lectures.revues.org
Let Them Eat Diversity chez Jacobinmag.com
Une réflexion sur “La diversité contre l’égalité en conférence – débat.”